Viandes rouges charcuteries et cancer

Viandes rouges, charcuteries et risque de cancer, les principales données

Un rapport récent du Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) a estimé qu’en France, chez les personnes âgées de 30 ans et plus, sur les 346 000 nouveaux cas de cancer de l’année 2015, 2031 cas (notamment 1700 cancers du côlon-rectum) étaient attribuables à une consommation de viandes rouges (>43 g/jour), et 4380 cas (notamment 3880 cancers du côlon-rectum) à une consommation de viandes transformées (charcuteries). [1]

Définitions

  • Les viandes rouges correspondent généralement à l’ensemble des viandes de boucherie : viandes de bœuf, de porc, de veau, d’agneau, de cheval et autres types de viandes (mouton, chèvre…).
  • Les charcuteries correspondent aux viandes conservées par fumaison, séchage, salage (saucisses, lardons, bacon, y compris le jambon). Dans les études anglo-saxonnes, les charcuteries sont englobées dans une catégorie plus large nommée « viandes transformées » incluant également les viandes en conserve.

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Lien entre viandes rouges, charcuteries et cancer

Niveau de preuve scientifique

De nombreux rapports d’expertise scientifique internationaux et français ont établi un lien entre la consommation de viandes rouges ou de viandes transformées (incluant la charcuterie) et le risque de développer un cancer.

En 2015, un groupe d’experts du CIRC a classé :

  • La consommation de viandes transformées comme cancérogène pour l’homme (Groupe 1)
  • La consommation de viandes rouges comme probablement cancérogène pour l’homme (Groupe 2A). [2]

En France, une expertise collective coordonnée par l’Institut National du Cancer (INCa) en 2015 confirmait le résultat de ces évaluations, en concluant à une augmentation du risque de cancer du côlon-rectum associée à la consommation de viandes rouges ou de charcuteries[3]

Dès 1997, le World Cancer Research Fund (WCRF) et l’American Institute for Cancer Research (AICR) ont évalué les niveaux de preuve des associations entre consommation de viandes rouges et viandes transformées et risque de cancer. Le dernier rapport, publié en 2018, conclut que le niveau de preuve de l’augmentation du risque de cancer du côlon-rectum est convaincant pour la consommation de charcuteries et probable pour la consommation de viandes rouges. [4]

 Localisation de cancers - Consommation viandes rouges et charcuteries France 2020

Focus sur les mécanismes

Plusieurs mécanismes peuvent expliquer l’augmentation du risque de cancer associée à une consommation excessive de viandes rouges et charcuteries.

En premier lieu, l’excès de fer héminique (fer contenu dans l’hème, structure chimique trouvée notamment dans l’hémoglobine, qui est très abondant dans les viandes rouges) génère un stress oxydant qui oxyde les graisses (lipides), formant des composés génotoxiques (c’est-à-dire toxiques pour l’ADN). [5]

De même, les sels nitrités présents dans certaines charcuteries entraînent, au cours de la digestion, la formation de composés N-nitrosés qui sont génotoxiques. En 2010, un groupe d’experts du CIRC a classé comme probablement cancérogène pour l’homme (Groupe 2A) les nitrates (issus de l’activité agricole) et les nitrites (agent de conservation en salaison) ingérés. [6]

Par ailleurs, le chauffage excessif au cours de la cuisson peut lui aussi mener à l’oxydation des lipides et à la formation de composés génotoxiques.  Ainsi, en 1993, un groupe d’experts du CIRC a conclu qu’un composé néoformé au cours de la cuisson (2-amino-3-methylimidazo[4,5-f]-quinoline) est probablement cancérogène pour l’homme (groupe 2A). [7]

De plus, en 2018, le dernier rapport d’expertise du WCRF et de l’AICR conclut à un niveau de preuve suggéré pour l’augmentation du risque de cancer de l’estomac par le mode de cuisson au grill et au barbecue de la viande et du poisson. [4]

La cuisson au grill ou au barbecue doit donc rester exceptionnelle, en privilégiant toujours les modes de cuisson doux ménageant la structure et la qualité de l’aliment.

Recommandations 

Afin de limiter les risques de cancer colorectal, l’INCa conseille de [8] :

  • Limiter sa consommation de viandes rouges à 500 g par semaine (soit l'équivalent de 3 à 4 steaks, 1 steak pesant entre 100 et 150 g).
  • Privilégier la volaille et alterner avec poissons, œufs et légumes secs (autres sources de protéines).
  • Limiter sa consommation de charcuteries à 150 g par semaine, en privilégiant le jambon blanc et le jambon de volaille (1 tranche pèse environ 40 g).

En 2019, Santé publique France a publié les nouvelles recommandations nutritionnelles destinées à la population adulte française [9]. Elles ont pour objectif d’aider les adultes à faire de meilleurs choix alimentaires et à adopter un mode de vie plus actif. Ces recommandations sont concordantes avec celles de l’INCa.

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Pour s’informer et se faire accompagner

En cas de consommation excessive de charcuteries ou de viandes rouges, il est recommandé de réduire autant que possible la taille des portions et la fréquence de consommation, de privilégier la volaille et en alternant dans la semaine avec du poisson, des œufs et des légumes secs.

Plus généralement, plusieurs outils déployés par Santé publique France sont disponibles pour faciliter la mise en pratique des recommandations nutritionnelles : 

  • le site mangerbouger.fr, avec notamment « La fabrique à menus », propose des idées de menus de saison variés pour manger équilibré toute la semaine en accord avec les repères nutritionnels.
  • Le Nutri-Score, logo à 5 couleurs apposé sur la face avant des emballages, informe les consommateurs sur la qualité nutritionnelle des produits. De « A » pour les produits les plus favorables sur le plan nutritionnel à « E » pour les produits les moins favorables.

Consommation de viandes rouges et charcuteries en France

En France, par rapport aux repères établis par Santé publique France, 32 % des 18-54 ans mangent trop de viandes rouges (plus de 500 g/semaine) et 63 % mangent trop de charcuteries (plus de 150 g/semaine). [10]

En 2014, la moyenne de consommation de viandes rouges chez les adultes de 18 à 79 ans vivant en France est de 47 g/jour soit 329 g par semaine. Elle est plus importante chez les hommes (428 g/semaine) que chez les femmes (239 g/semaine). La consommation moyenne de charcuteries est de 27 g/jour soit 189 g par semaine, 239 g chez les hommes et 146 g chez les femmes. [11]

Des différences socioéconomiques et régionales existent. La consommation de viandes rouges est plus importante chez les personnes ayant un faible niveau d’étude. Le taux de consommateurs et la quantité de charcuteries consommée est plus faible en Île-de-France par rapport aux régions Nord-Ouest, Sud-Est et Sud-Ouest. [11]

Consommation de viandes rouges et de charcuteries : situation des adultes français de 18-54 ans

Source : Esteban 2015

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Références

[1] Arnold M, Touillaud M, Dossus L, Freisling H, Bray F, Margaritis I, et al. (2018). Cancers in France in 2015 attributable to high body mass index. CancerEpidemiol. 52:15–9.

[2] International Agency for Research on Cancer. Consumption of red meat and processed meat. Lyon: IARC, 2015. (IARC monographs on the evaluation of carcinogenic risks to humans, Vol. 114). Disponible sur : <monographs.iarc.fr> (Consulté le 02.03.2020)

[3] Institut National du Cancer. Nutrition et prévention primaire des cancers : actualisation des données. Boulogne-Billancourt : INCa ; 2015. Voir le rapport

[4] World Cancer Research Fund / American Institute for Cancer Research. Food, Nutrition, Physical Activity, and the Prevention of Cancer: a Global Perspective. Washington DC: AICR, 2018. Disponible sur : <www.wcrf.org> (Consulté le 02.03.2020).

[5] Bastide NM, Chenni F, Audebert M, Santarelli RL, Taché S, Naud N, Baradat M, Jouanin I, Surya R, Hobbs DA, Kuhnle GG, Raymond-Letron I et al. A central role for heme iron in colon carcinogenesis associated with red meat intake. Cancer Research. 2015 Mar 1;75(5):870-9.

[6] International Agency for Research on Cancer. Ingested Nitrate and Nitrite, and Cyanobacterial Peptide Toxins. Lyon: IARC, 2010. (IARC Monographs on the evaluation of carcinogenic risks to humans, Vol. 94). Disponible sur : <http://monographs.iarc.fr> (Consulté le 02.03.2020).

[7] International Agency for Research on Cancer. Some Naturally Occurring Substances: Food Items and Constituents, Heterocyclic Aromatic Amines and Mycotoxins. Lyon: IARC, 1993. (IARC Monographs on the evaluation of carcinogenic risks to humans, Vol. 94). Disponible sur : <http://monographs.iarc.fr> (Consulté le 02.03.2020).

[8] Institut National du Cancer. Dossier web « Aliments ». Disponible sur : <e-cancer.fr> (consulté le 02.03.2020)

[9] Santé publique France. Recommandations relatives à l'alimentation, à l'activité physique et à la sédentarité pour les adultes. Janvier 2019. Disponible sur <www.santepubliquefrance.fr> (consulté le 02.03.2020)

[10] Torres MJ, Salanave B, Verdot C, Deschamps V. Adéquation aux nouvelles recommandations alimentaires des adultes âgés de 18 à 54 ans vivant en France. Étude Esteban 2014-2016. Volet Nutrition - Surveillance épidémiologique. Saint-Maurice : Santé publique France ; 2019. 8 p. Disponible sur : <www.santepubliquefrance.fr> (consulté le 02.03.2020)

[11] Étude individuelle nationale des consommations alimentaires 3 (INCA 3). Avis de l’Anses. Rapport d’expertise collective. Disponible sur <www.anses.fr> (consulté le 02.03.2020)

Date de modification : 14 novembre 2023 | Date de création : 02 mars 2020 | Rédaction : NACRe