Les plantes biosenseurs pour le crible des stimulateurs des plantes
Dans la cadre du Labcom, le développement de plantes ou de cals biosenseurs a été initié pour mesurer la stimulation de gènes clefs impliqués soit dans les voies de réponses des plantes aux stress biotiques et abiotiques, soit dans la croissance. Ces outils de criblage amont de l’activité de stimulateurs (SDP ou biostimulants) et de l’efficacité de leur application permettra de caractériser leur mode d’action. Trois biosenseurs d’Arabidopsis destinés au crible d’effets biostimulants et cinq autres au crible d’effets SDP sont en cours de validation (figure 1). La mise au point de la méthodologie de criblage des produits débutera en 2018. Il s’agira i) de mettre au point les méthodes qualitatives et quantitatives d’estimation de l’expression du gène rapporteur associé, ii) d’identifier les stades de développement et les conditions environnementales les plus favorables à la mise en évidence d’une stimulation et iii) d’identifier les biosenseurs révélant un effet positif des stimulateurs des plantes. En parallèle de ce travail, des biosenseurs de Tomate vont être développés, et des expérimentations sur cals seront menées.
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Figure 1. Comparaison de l’effet de deux traitements sur l’activité du gène rapporteur GFP sous le contrôle du promoteur d’un gène lié à la ramification. A : stimulateur de la ramification et B : inhibiteur de la ramification. |
Un dispositif expérimental ingénieux pour l’évaluation des biostimulants et SDP en conditions de contraintes abiotiques …
Partenaire privé de ce laboratoire commun ESTIM, l’AREXHOR Pays de la Loire réalise de la mise au point des méthodes expérimentales pour l’évaluation des stimulateurs de défense des plantes (SDP) et des biostimulants. Dans ce cadre, l’entreprise a développé un système d’expérimentation autonome en subirrigation centré sur l’application des conditions de stress abiotiques sur tomate et vigne. L’équipe a également défini une méthode pertinente d’évaluation des effets agronomiques des stress abiotiques étudiés et des effets des produits appliqués. Ainsi, à ce jour l’AREXHOR Pays de la Loire est en capacité d’utiliser ce système pour tester l’effet de biostimulants vis-à-vis de certaines contraintes environnementales (notamment stress salins, stress hydrique, stress ombre…). Ce même système pourra également être utilisés pour vérifier la capacité de SDP à activer les défenses des plantes dans telle ou telle conditions contraignante. En parallèle l’AREXHOR Pays de la Loire développe des tests de germination de graines de tomate pour le crible de biostimulants.
… Utilisé pour mettre au point des outils de caractérisation de stress abiotiques
Le Labcom ESTIM s’intéresse au développement d’outils permettant d’évaluer l’état physiologique de la culture au moment où sont appliqués les stimulateurs des plantes, les hypothèses étant que i) cet état conditionne la réactivité de la plante aux SDP et que ii) cet état peut être modulé par l’apport en biostimulants. L’état physiologique de la plante est probablement très dépendant des conditions environnementales rencontrées par la culture (contraintes abiotiques), c’est pourquoi le Labcom vise à créer des outils capables de caractériser cet état.
• basés sur des marqueurs moléculaires
Cet outil moléculaire vise à suivre l’expression de gènes marqueurs de différents stress abiotiques et de l’état physiologique de la plante par RT-qPCR. Une centaine de gènes candidats issus de différentes cultures ont été identifiés (littérature, genevestigator etc..). Après mise au point d’amorces spécifiques permettant d’amplifier ces gènes sur Tomate, leur expression a été analysée dans une échantillothèque de tissus de cette espèce cultivée dans différentes conditions environnementales. A l’heure actuelle une dizaine de gènes ont été validés comme marqueurs des stress abiotiques pour cette culture.
• basés sur de l’imagerie
L’imagerie de fluorescence de chlorophylle met en jeu un protocole d’éclairement permettant une excitation saturante du photosystème II des feuilles de Tomate, suivi de prise d’image…. Des expériences ont été menés sur tomate placées dans différentes conditions environnementales pour identifier de potentielles signatures de fluorescence propres à chacun des stress. L’analyse des images obtenues à partir de la mesure ou du calcul d’une soixantaine de paramètres de fluorescence du photosystème II, suggère qu’il est possible de mettre en évidence des différences de signature entre différents stress abiotiques sur certains paramètres (figure 2). Des approches complémentaires de clustering (construction de dendrogrammes) sont développées pour tester notre capacité à discriminer des données de phénotypage issues de plusieurs situations environnementales sur de grands jeux de données. L’objectif est de poursuivre l’acquisition de données de fluorescence de feuilles de Tomate, dont les plants sont soumis à une diversité de contraintes environnementales, de manière à 1) consolider les résultats obtenus sur l’évolution des paramètres de fluorescence et 2) à perfectionner le traitement et la représentation des données acquises.
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Figure 2. Discrimination, par lecture de boxplots, de signatures de fluorescence de chlorophylle propres à chacun des stress étudiés. Résultats d'émission de fluorescence pour 3 paramètres de fluorescence de chlorophylle Rfd_L2, Ft_D1 et Ft_L3, d'échantillons ayant subis de gauche à droite un stress lumière, pas de stress (témoin) ou un stress fertilisation. |
… Pour étudier la corrélation entre la variabilité d’efficacité d’un stimulateur des plantes et l’évolution de la communauté microbienne associée à la plante.
Partis du constat que l’efficacité des SDP varie d’une application à l’autre, fonction des conditions environnementales et de l’état de réceptivité de la plante, nous avons souhaité nous intéresser à l’évolution de la phyllosphère (la feuille et son environnement) comme l’un des facteurs potentiellement déterminant de cette variabilité. L’objectif est de mettre en évidence une corrélation entre la variabilité d’efficacité d’un SDP et l’évolution de la composition de la phyllosphère de plants de Tomate et de Vigne. Il en est de même concernant l’étude de l’efficacité des biostimulants vis-à-vis d’une résistance à des contraintes environnementales. Des premiers essais ont permis de mettre en évidence une forte variation de la phyllosphère entre des plants d’un même génotype d’un part et entre des répétitions biologiques indépendantes d’autre part due à des sources différentes de bioaérosols. Bien que les mêmes taxons puissent être identifiés pour chaque modalités d’essai, leur abondance relative diffère d’une plante à l’autre. La mise au point de la méthodologie d’échantillonnage puis de la technique de lavage des feuilles pour isoler le microbiote a permis de conclure 1) à un nombre minimum de 5 feuilles pour effectuer une analyse 2) à une absence de variation significative de la phyllosphère entre les étages foliaires d’un plant de Vigne et 3) à une meilleure reproductibilité des mesures en utilisant un lavage par stomachage par rapport à un bain ultra-son (figure 3). Ayant procédé à l’identification du microbiote natif sur feuille de Vigne et de Tomate, la prochaine étape est d’étudier la composition de la phyllosphère de ces espèces en lien avec des différences d’efficacité de traitement SDP ou de biostimulants en appliquant ces conclusions.
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Figure 3. Composition taxonomique des communautés bactériennes associées à la phyllosphère de la tomate (sur des échantillons de deux étages foliaires différents dont le microbiote a été extrait selon deux techniques de lavage). |
Criblage de Sensitines : vers une meilleure efficacité des défenses des plantes
Les sensitines sont des molécules qui ont la particularité de rendre les agents pathogènes plus sensibles à l’arsenal de défenses naturelles des plantes, en fragilisant par exemple leur paroi, leur système de détoxication, etc, c’est-à-dire leur propre système de défense. Leur utilisation couplée ou non à des SDP permettrait donc une meilleure efficacité des défenses des plantes. Une technique de crible moléculaire, reposant sur l’exploitation d’une levure possédant un marqueur de la voie métabolique UPR - impliquée dans le système de défense des champignons - associé à un gène rapporteur GFP, a été mis au point afin de tester l’action inhibitrice d’un large panel de molécules sur cette voie. Ensuite, des suivis de croissance in vitro de champignons phytopathogènes en présence de molécules les plus prometteuses et de phytoalexines (en quantité sub-létale), a mis en évidence l’action « sensitine » de trois d’entre elles, tout au moins in vitro. L’application de ces dernières sur le pathosystème Alternaria brassicicola/choux est en cours de réalisation (figure 1), après quoi la synergie en présence de SDP sera étudiée. En cas de résultats concluants, la démarche sera élargie à des pathosystèmes impliquant la Tomate et la Vigne.
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Figure 4. Validation in planta de l’effet potentialisateur d’une sensitine. Des feuilles de chou (Brassica oleracea) ont été inoculées directement (à gauche) ou après microblessure (à droite) par des suspensions de spores du champignon pathogène A. brassicicola en présence de sensitine (à dose non toxique pour le champignon) ou de DMSO (solvant utilisé). La progression de la maladie (nécrose foliaire) est stoppée pour les essais réalisés en présence de sensitine, démontrant son effet synergique avec la brassinine (phytoalexine produite par le chou lors d’infections). |