Par Eric Lichtfouse

Vous êtes submergés par des dizaines d’emails indésirables ? Alors voici une bonne nouvelle : la messagerie email est en train de disparaître au profit du réseau social. Comment expliquer ce phénomène ? D’un coté l’email est un média classique, unidirectionnel, comme les journaux au format papier qui vous imposent des informations non désirées, autant dire la préhistoire à l’ère du smartphone... De l’autre coté le réseau social diffuse des informations sélectionnées et personnalisées. Mieux, le réseau social est un véritable écosystème numérique dans lequel des individus et les communautés – les groupes d’amis ou de relations – évoluent et s’adaptent dans un environnement changeant.

A l’instar des écosystèmes naturels on retrouve au cœur de l’écosystème numérique le mécanisme essentiel de sélection. Ainsi, nouvellement inscrit sur un réseau vous commencez à constituer un cercle de relations. Vous le faites par affinité amicale ou professionnelle, c’est une première sélection de personnes qui a priori sont susceptibles de vous fournir de la bonne information. Ensuite vous lisez le fil d’actualité, c’est à dire le journal des nouvelles de vos relations. Certaines nouvelles sont fades, vous les passez rapidement. D’autres attisent un peu votre curiosité, vous cliquez rapidement sur l’icône j’aime. D’autres encore provoquent votre admiration ou votre désapprobation, vous écrivez un commentaire en dessous du billet. Enfin certaines nouvelles étant franchement excellentes vous ne résistez pas à les partager ou les retweeter à vos relations qui les partageront à leur tour avec leurs propres cercles. C’est le début d’une infection qui peut devenir virale en se propageant à des milliers d’individus.

 Vous pouvez également créer des groupes d’affinité pour échanger des informations visibles uniquement dans un groupe, c’est à nouveau une forme de sélection.  Une messagerie instantanée vous permet enfin de dialoguer avec une ou plusieurs relations. Grâce à l’ensemble de ces actions le réseau social ‘comprend’ vos centres d’intérêts, il va donc peu à peu modifier et personnaliser votre fil d’actualité en sélectionnant uniquement les informations qui vous intéressent, d’où un gain de temps considérable. Les applications potentielles pour la recherche sont immenses, que cela soit pour la production de connaissances par des communautés mondiales jusqu’à la diffusion des savoirs. En témoigne bien la recrudescence récente des services scientifiques intégrant des fonctions sociales : Academia.edu, C@fé des Sciences, Calaméo, Colwiz, CiteUlike, FigshareMendeley, FoldIt, MyExperiment, MyScienceWork, ORCID, Research Blogging, ResearchGate, ResearcherID, ScienceSeekers, SciLogs, Slideshare, SciVee, Zotero. On peut se demander si un réseau s’imposera ou si plusieurs réseaux vont subsister en équilibre dans un écosystème de réseaux. Si l’on reprend l’analogie avec les écosystèmes naturels, ce sont les organismes les plus petits et se reproduisant le plus vite, c’est à dire les microbes, qui ont survécu plusieurs centaines de millions d’années d’évolution. Il est alors probable que twitter survive en raison d’un format très court et d’un processus optimisé pour la communication instantanée. Comme dans la nature l’adaptation sera un mécanisme essentiel dans l’univers digital…